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comment_514072

Trouvé sur un autre forum, long mais bien marrant... On se reconnaît a travers son petit roman :)

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Oui, nous évoluons tous, d'un côté comme de l'autre, l'âge aidant.

Et vous ? Comment avez-vous évolué face à votre perception de l'automobile ? Êtes-vous vraiment resté le (la) même que ce jeune foufou (jeune fofolle) qui venait tout juste d'obtenir son papier rose

Moi pas.

Dans les méandres de la vie, la passion auto, ce gros jouet pour enfants attardés prend cher. Elle doit affronter des facteurs tous mieux armés les uns que les autres. Parfois elle en sort vivante et renforcé, parfois amoindri, souvent elle disparaît dans les flots d'un quotidien gris comme une façade en gare de l'Est.

Sur cette terre d'asile qu'est l'Automobile Sportive, nous nous efforçons de résister, mais c'est pas si simple.

D'autant que nous n'avons pas tous les mêmes cartes en main au départ. Entre indécrottable prolétariat et cuillère d'argent dès l'origine, il existe un tas d'histoires qui se rejoignent dans le feu sacré d'une même volonté d'exister au travers cette passion qu'est la voiture de sport. put***n c'est beau ça.

Je m'en vais de ce pas vous conter cette histoire, la mienne, même si je romance suffisamment j'espère, pour éviter le 3615 Mylife, en espérant que d'autres nous fassent voyager au travers leur propre histoire également.

Pardon Ours, ça risque d'être long. J'espère néanmoins te divertir (si toutefois tu es arrivés jusque là).

Ce topic est donc dédié à la passion qui ravage certains d'entre nous et malgré tout.

Au départ, doté d'une tête pourtant bien vissé sur les épaules, je ne pense que chrono, travers de porcs, trajectoires osés et moitié de zone rouge usée par le frottement.

Chaque déplacement est prétexte à se faire plaisir au maximum, passer plus vite et plus fort que le jour précédent, prendre des notes même. La CB est alors à la mode et permet de nous créer de toutes pièces des "spéciales" intégralement sécurisées. C'est ainsi que je remplis des morceaux de nuits à base de jappements féroces, de mécaniques sur-exploités et de dérives parfois hasardeuses.

Bien sûr et invariablement pour nous autres mordus, mes premiers salaires n'ont pas le temps de s'ennuyer. Mes meilleurs potes ? Total, Michelin et Ferodo.

Ça ne me dérange pas de faire des pleins pour aller nul part, mais le plus vite possible, et en faisant des détours de préférence, afin d'arriver là où je verrais bien. Ça ne me dérange pas plus de contempler la toile de mes pneus qui viennent à peine de fêter leur 7000ème kilomètre et j'ai toujours un jeu de plaquettes de rechange dans la boite à gant (bien avant les préservatifs).

Le temps s'écoule, au rythme endiablé des petits duels entre amis et au son tonitruant du dernier Devil® que l'un de nous a pu se payer avec son 13ème mois.

Et puis on ne sais pas trop ce qui se passe. Où plutôt si. Quelque chose change, se modifie. Les premiers salaires de poche finissent invariablement par être utilisés dans la vrai vie. La jeunesse s'éloigne, l'innocence prend des coups dans les reins, l'insouciance, cette douce insouciance, graal d'une vie lorsque c'est possible, s'en va vers d'autres esprits plus réceptifs. On s'aperçoit qu'avec un pneu avant, on fait 2 semaines de caddie et qu'avec les 3 autres, ça nous paye le loyer. D'un coup c'est plus pareil, on reste joyeux, mais on fait nettement plus attention.

Malgré tout, un beau jour, il y a l'autre avec son gros cube sportif à deux roues. On se dit "quoi ? mais ça pousse plus fort qu'une Ferrari pour le centième de son prix ce truc !!"

Alors zou, on s'y met, les premiers choc, arrêt de travail, problèmes, la passion est toujours là, mais elle se prend un coup dans la gueule, on se dit que non, c'est trop handicapant, et puis on rend malheureux les proches, tout ça, pas fier quoi...

Et puis on commence à sortir un peu plus avec de jolies demoiselles qui n'ont que faire d'un excité qui ouvre tout en grand sous prétexte que le feu vient de passer au vert en même temps que la BMW d'à côté (réflexe bête).

Ensuite, on prend des responsabilités avec les salaires qui vont avec. Et là on s'aperçoit, c'est vrai, qu'on peut faire les courses ET changer les pneus. En revanche, le fait d'arriver au boulot avec les étriers fumants et l'échappement sous le bras devient rapidement hors propos. Alors on y va moins vite, nettement moins vite. Le rond point perd son statut de chicane et redevient simple giratoire. Plus le temps de plier la bagnole, ça la fout trop mal. C'est dommage, car la voiture de son côté est plus sportive et plus efficace que jamais. C'est le début d'un paradoxe qui plus jamais ne me quittera.

Alors on évolue encore. On se déplace, on devient mobile, pour aller chasser le niveau social sur d'autres territoires. Alors on roule vite, c'est vrai, mais surtout en ligne droite... Et puis moins vite, parce que le carburant commence à poser vraiment problème... et puis vraiment moins vite, parce que même moins vite, ça pose encore problème...

Et puis on rencontre Maman. Qui a forcément d'autres aspirations que de bosser pour des trains de pneu ou du 20 litres au cent. Alors on tripote un boulon, on essuie un écrou, mais on voit bien que la mode n'est plus à l'égoïsme. Mais bordel ça travaille, cette enfilade de 15 km, qu'on attaque dorénavant comme un flanc mal cuit "pour pas mettre tout le pognon la dedans".

Mais c'est vrai qu'il vaut mieux aller en vacances pas trop vite en vivant comme on veut, que pas en vacances très vite en ne vivant pas. Ce nouvel angle d'attaque me laisse bien dubitatif mais me convaincs sans trop de peine.

Sans compter que d'autres horizons s'ouvrent à nous. Des océans de diversités qui ne demandent qu'à être exploré. De nouvelles rencontre, bien moins portés sur la pipe d'admission inox et souvent plus intéressantes au bout du compte.

Alors le drame arrive, inévitablement. On passe au diesel. Fourbe récréation pourtant, aussi imprévisible que inattendue. Les diesels ont eu le temps de se coursifier, elles sont pourvus dorénavant de tous les atouts dynamiques de leurs homologues essence, je m'engouffre dans l'ouverture et c'est d'une façon machiavélique que je peux retaper dedans comme un goret à 7,5 de moyenne, sans que Maman ne s'aperçoive de rien.

Miroir aux alouettes. Ça en a la couleur, ça en a le goût, mais la saveur n'y est pas. Un peu comme un martini sans alcool ou une cigarette light.

En prime, le diesel de course, c'est bien, mais tout ce qui est autour aussi est de course. Les premiers changements de consommables font froid dans le dos, ont se dit que c'est vraiment déconnant, que ça recommence, qu'on va surtout pas bosser que pour ça, alors on se calme et on s'autorise une incartade "des fois", mais plus trop, on a envie d'acheter d'autres choses que des disques de frein et des changement de filtres.

Bon mais alors, si le diesel, ça sert à rien consommer en bourrant et qu'on ne bourre plus, autant repasser à de l'essence, du gros, du bon, de l'efficace ! Du qui va nous permettre d'avoiner relax, en toute discrétion !

Et puis merde, on gagne suffisamment maintenant, faut pas charrier !

Ben oui mais là, c'est l'époque qui a changé. Les chaines de radar tournent à plein régime, les képis ont la bave aux lèvres et n'aiment rien tant que s'allonger en haut des ponts pour nous piéger au détour d'un ruban trop joyeux. Alors on joue avec le feu un moment, on revis, on troque les petits enchaînements d'antan contre des déplacements à très haute vitesse, et puis une chaleur, et puis deux, trois, les PV qui sautent in-extremis, le copain qui dit que c'est la dernière fois, que même lui il peut plus, alors on va moins vite, puis beaucoup moins vite... Ben oui mais alors... À quoi il sert le gros bordel essence qui consomme à mort, si c'est pour se traîner comme une larve ? L'aigreur et la frustration, ces deux poisons prennent alors le contrôle de la salle des machines en imposant un nouveau régime, qui promet de manquer de sel.

Alors on se fâche, on achète n'importe quoi en disant "qu'ils aillent tous se faire foutre !". Fier comme tout, on va au taf comme un bon gros caisseux en ayant rien à foutre de rien et en réservant son pouvoir d'achat à des choses bien plus captivantes que ce jeux de con. Mais nous perdons quelque chose en route. On s’éjecte du train, on ne se ressemble plus. Et puis quelle infâme punition ! Que c'est devenu triste ! La frustration change de camps. Elle retourne sa veste et rentre à la maison, la queue basse et l'armure de certitudes fissurée.

En plus, les coping, eux, ils sont pas tous fâchés pareil !

Alors ils défilent à la maison avec des pistons partout et des vroum qui tuent. Toi, fier, tu leurs dis qu'ils ont vraiment tout faux, que c'est fini tout ça, alors ils rigolent, toi aussi, mais tu n'y crois pas toi même. Quand ils repartent, que ça vavavoum au loin, ben toi tu es là, comme un con sur le pas de porte avec ton chiotte de mec fâché.

Tu te dis mais merde, non ! Ne pas craquer ! Je m'en fous ils vont se faire chopper au radar de toutes façons, et PAf ! Seulement la fois d'après, non, ils se sont pas forcément fait chopper, toi tu viens juste de rentrer du concessionnaire avec ton échappement tout neuf mais tout percé, et eux ils viennent de s'acheter les derniers conti-sport qui ont une gueule d'enfer et un grip de folie. Alors tu commences à regarder tes 145/13 SAVA d'un oeil haineux. L'aigreur et le comportement raisonnable viennent de perdre une bataille décisive, mais ils ne le savent pas encore.

Car tu sens bien au fond de toi que tu n'as pas grandi du tout en fait.

Alors tu expliques à Maman, qui s'en rend bien compte de toutes façons, que tu es malheureux. Que tu en peux plus de ce petit chiotte de tarlouze, qui ne t'apporte que rejet et vilaines pensées. En plus, ça y est, tu te comportes comme un caisseux, tu te pose comme une merde n'importe où, tu mets plus tes clignotants, tu tires dedans à froid, tu laisse la bagnole cradingue, bref.

Le pire, c'est que tu l'a gardé ton gros bordel qui va vite. Sous cellophane ! Et à chaque fois que tu l'allumes, ben tu revis.

Mais quelle torture de s'apercevoir invariablement que tout s'oppose à son usage ! Que le voisin d'à côté a raison d'être content avec sa toyota break. Qu'il est passé à autre chose ! Qu'il doit être bien !

D'accord, mais le voisin d'à côté, tu n'en a rien à foutre. Toi tu as des affiches partout dans ton garage, des bouquins partout, tu lis Echappement et tu campes chez tes copains concessionnaires. Un accroc au joint ne peut guérir s'il vit dans un coffee shop et toi tu passes ta vie dans un coffe shop !

Alors tu prends une décision, tu tournes les talons et tu va voir Maman d'un pas décidé.

Et tu lui dis, bon. C'est décidé, on se sépare du gros bordel qui sert à rien. Mais comme je suis pas encore mort, on prend à la place un petit bordel qui pousse quand même, mais qui consomme pas. On essaye, on verra bien !

Et comme Maman n'est pas chiante, elle est d'accord. Alors on achète le petit chiotte sportif (en restant prudent malgré tout, on range le gros bordel dans un coin, on sait jamais).

Et là ça recommence. C'est bien, c'est plein de sport comme je l'aime dorénavant, comme c'est beau ces grosses jantes ! Ouh ! Il est où le compresseur ? Tiens je vais demander aux autres débiles comme moi. Oh ! C'est sympa les pneus d'enfer, et puis ça pousse ! Oh ! Tu as vu ! Elle prend 7000 tours ! Pas mal hein ? Tiens d'ailleurs, je rentre de chez Tintin-sport et Ils risquent de sortir le truc dont je te parlais en 4 roues motrices ! C'est quand même un plus tu trouves pas ?

Bien sûr, Maman est d'accord, tout comme toi elle aime la sécurité active, et puis elle ne veut que ton bonheur après tout. Tu lui glisse donc dans le flot de la conversation : "par contre, elle risque de faire 300 ch".

Et là, oh merveille, tu ne reçois pas de signal néfaste.

Maman fait semblant de n'avoir rien entendu, et toi, tu ne t'es pas aperçu que tu viens de replonger grave. Mieux, tu oses un fripon "C'est comme l'A5, c'est quand même chouette un coupé hein ?"

Maman rit, tu ris, mieux que ça, elle est plutôt d'accord. Tu viens de libérer la passion que tu avais enfermé à double tour...

L'aigreur et le sinistre raisonnable ne sont plus que des points à l'horizon et tu n'a presque pas honte...

Jusqu'à la prochaine fâcherie en tout cas.

Et voilà.

Posté(e)
  • Auteur
comment_514087

C'est superbement bien raconté je trouve... "quand le rond point perd son statut de chicane"  :W

Posté(e)
comment_514141

Oui, pas mal de passages ressemblant.

 

Quand on a une telle passion, on évolue tous un peu dans le même sens.

Posté(e)
comment_514144

Superbe texte... Merci a l'auteur... Beaucoup de vrai et beaucoup de réflexions qui nous touchent tous...

Posté(e)
comment_514156

Superbement conté et tellement vrai ...Trouver sur un forum DUCATI non ?

Posté(e)
comment_514264

Quel pavé, mais bien rédigé, ca se lit tt seul.

On est tous drogué a la même came et c'est dur de s'arreter.

Posté(e)
comment_514287

Du trés beau!!!!Superbe!!!!Pour palier au periodes de frustations je garde ma M// dans le coin du garage en attendant que le bon moment arrive!!

Posté(e)
comment_514424

Comme disait Charles : " je vous parle d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre"

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